Hommage de Balzac à Madame
de Berny, en 1837, dans une lettre à Mme Hanska
... je serai bien injuste si
je ne disais pas que de 1823 à 1833 , un ange m'a soutenu
dans cette horrible guerre . Madame de Berny quoique mariée,
a été comme un dieu pour moi, elle a été
une mère, une amie, une famille, un ami, un conseil; elle
a fait l'écrivain, elle a consolé le jeune homme,
elle a créé le goût, elle a pleuré
comme une soeur, elle a ri, elle est venue tous les jours, comme
un bienfaisant sommeil, endormir les douleurs ; elle a fait plus
; quoiqu'en puissance de mari, elle a trouvé moyen de
me prêter jusqu'à 45 000 francs, et j'ai rendu les
derniers 6000 francs en 1836 avec les intérêts à
5 p. 100 bien entendu... sans elle, certes, je serais mort, elle
a souvent deviné que je n'avais pas mangé depuis
quelques jours, elle a pourvu à tout avec une angélique
bonté, elle a encouragé cette fierté qui
préserve un homme de toute bassesse... cette fierté
que Boulanger a peut-être un peu trop poussé à
l'excès dans mon portrait. Aussi ce souvenir est-il pour
beaucoup dans ma vie, il est ineffaçable, car il se mêle
à tout. Il n'y a plus chez moi de larmes que pour deux
personnes, pour elle qui n'est plus, et pour celle qui est encore
et qui, je l'espère, y sera toujours.
Lettres à Madame Hanska,
par Roger Pierrot, coll. Bouquins |